[Flashback] Althaziel et Orion : Retrouvailles...]

La route parcourue l'avait mené jusqu'en Himalaya. Jamir... C'est ici qu'il pensait trouver celui qu'il cherchait depuis maintenant des années.

Un long boyaux a peine plus large qu'un corps humain traversait un précipice dont le fond était masqué par un épais manteau de brume. Un vent violent faisait voler sa cape derrière lui, main de velours violette entendant son emprise sur le monde matériel.

Le spectre se tenait là, juste devant ce pont de fortune, seul rempart vers Orion. Un peu plus haut il pouvait distinguer la haute tour dont le sommet se perdait dans les nuages, relativement bas a cette altitude. Les cheveux d'Althaziel flottaient et venaient balayer son visage, masse blanche immaculée qui contrastait avec la noirceur de son âme.

Il entreprit de traverser le pont, sans un seul instant chercher a regarder en bas. Le regard fixé sur l'horizon, son seul véritable objectif. Lorsqu'il arriva au pied de la tour, il leva les yeux vers le sommet. Tel un doigt pointé vers les cieux, elle semblait narguer le petit être se trouvant en bas. Un défi lancé aux dieux ? Une façon de rappeler aux hommes leur infériorité ou au contraire, une construction humaine destinée a élever ceux qui l'avaient battit ?

"Orion !" hurla t-il

Le spectre, dans son surplis rutilant, absorbant petit à petit la lumière environnant tel un puis sans fond, se tenait dans le large encadrement de ce qui ne pouvait plus être qualifié de porte.

"Orion !!! Montre toi !" cria t-il aux quatre vents.

Althaziel attendit un moment. Il espérait ne pas avoir parcourut toute cette distance pour repartir.

Après l'obtention de son armure, Orion avait décidé de s'octroyer quelques heures de repos bien mérité. Il mis ce temps à profit pour parcourir de long en large les couloirs du palais de Jamir et faire la liste de ses priorités : consulter la bibliothèque, observer les étoiles du haut de la tour, étudier les outils et armures présents dans quelques alcôves.
Bref, un travail passionnant en perspective !
Au moment où Orion commençait à se diriger vers la bibliothèque, un cri s'éleva aux portes du palais. Un inconnu criait son nom avec force. Etrange... Qui donc pouvait le héler d'une telle façon ? Ennemi ou ami ?
Vétu de sa splendide armure et accompagné du claquement de sa cape au rythme de ses pas, le chevalier d'or passa le pas de la porte et posa un regard neutre sur l'individu qui venait de pénétrer sur ses terres. D'un coup d'oeil, Orion se souvint de lui.
Il s'agissait de l'étrange spectre qu'il avait croiser voilà peu de temps aux abords de son temple. Orion avait eut à faire à maintes reprises à des serviteurs d'Hadès. Et ces rencontres étaient pour le moins inégales : Setesh était devenu son ami alors que deux juges l'avaient mutiler... Bref, Orion s'avança sans laisser paraitre la moindre émotion sur son visage.

- Allons, allons, pas la peine de hurler. Ton seul cosmos aurait suffit à me faire sortir de ma demeure. Je suis Orion, chevalier d'or du Bélier. Bienvenu sur mes terres, spectre. Que puis je faire pour toi ?

Orion venait de s'exprimer comme à son habitude d'un ton calme et posé, sans animosité. Pourtant, de par son attitude, il tenait à signifier sans ambiguité à son interlocuteur qu'il venait de pénétrer sur le territoire d'un chevalier d'or. La moindre attitude hostile pourrait lui valoir de sévères ennuis.
Etrangement, Orion ne parvint pas à faire taire une certaine nervosité. La seule présence de ce spectre le déroutait. Non par la puissance de son cosmos mais à cause d'un bien étrange pressentiment.

- Allons, allons, pas la peine de hurler. Ton seul cosmos aurait suffit à me faire sortir de ma demeure. Je suis Orion, chevalier d'or du Bélier. Bienvenu sur mes terres, spectre. Que puis je faire pour toi ?

Althaziel posa les yeux sur l'armure rutilante du chevalier. Son regard se posa ensuite sur le visage de son interlocuteur. Il n'avait pas changé. De toute évidence, il ne le reconnaissait pas de la manière dont il aurait du le reconnaitre.

"Tu n'as pas changé d'un pouce... Dimitri."

Le spectre se tenait debout, face à cette bouche béante, prête à l'avaler. Les entrailles du temple crachaient leur souffle, caressant son visage telles mille mains venues l'enserrer. Il avança vers Orion, lentement. Son surplis faisait claquer les pavés sous ses pas, resonnant contre les larges murs de l’édifice. Il était venu dans un but précis. Des années de recherches pour parvenir à cet instant. Il se tenait enfin face à lui.

"Comment vas tu ? Petit frère..."

Un sourire glaciale orna les lèvres du spectre. Une lueur de cruauté voila son visage. Il savait par ces simples paroles qu'il déstabiliserait le chevalier d'or. Voila de longues années qu'ils ne s’étaient vus tous les deux. Orion avait parcourut du chemin depuis. Rien qu'entre son départ de la maison du Bélier et maintenant. Il ne restait plus qu'a achever le travail.

"Je suis content de te revoir."

Une bourrasque souleva sa lourde cape, lui donnant des airs de fantôme. Lentement, il ôta son heaume pour que son interlocuteur puisse voir son visage, et ainsi lui rappeler les traits de son grand frère. Sa masse de cheveux blancs fouettèrent ses joues, le cachant à demi. Althaziel savait qu'il se trouvait sur le territoire du chevalier, mais cela lui importait peu. Revoir son cadet lui laissait un sentiment mitigé. Partagé entre une folle envie de vengeance et en même temps une irrépressible envie de le rallier a sa cause. Mais sans sa mort, il n'assouvirait jamais sa soif de revanche. Il pointa vers lui un poing accusateur.

"Tu m'as ôter ma seule raison de vivre." dit-il dans un sourire.

La seule présence de ce spectre mettait Orion mal à l'aise. Bien peu de personnes avaient su faire naitre un tel émoi chez le placide chevalier.
Lorsque le Basilic ouvrit la bouche, de la sueur vint perler sur le front d'Orion. A l'évocation de son véritable prénom, il sut. Il reconnut l'identité de cet individu avant même qu'il ne retire le casque de son surplis. La ressemblance physique était indéniable. Ils n'étaient pas frères pour rien.
Une bourrasque glacée balaya la plaine.
Malgré ses paroles amicales, la haine et la colère se lisait dans le regard du spectre. Orion sentit une boule de nerfs naitre dans les tréfonds de son estomac. Il gardait un vague souvenir de son ainé. Leur père lui avait toujours citer de Nicolaï en exemple à ne pas suivre... Il parlait de son insolence, de son manque de respect, de son entêtement. Leur géniteur avait abandonner son premier fils. Connaissant mieux que nul autre la cruauté de ce sombre individu qui les avaient engendrer, Orion éprouva une vague de compassion envers son frère.

- Je... Je pensais ne jamais te revoir...

Une sombre pensée coupa Orion dans ses paroles. L'étonnement sur son visage se mua en un masque impassible. Son frère était revenu sous les traits d'un spectre... Un serviteur du sombre monarque. Malgré son soulagement, sa joie initiale de retrouver un frère trop vite disparu, Orion se mit sur ses gardes. Ses sentiments ne devaient pas influer sur son jugement.

- Je vais bien comme tu peux le constater. Il semblerait qu'on ne puisse pas en dire autant de toi. Je suis peiné de te voir revenu sous l'apparence d'un spectre...

L'accusation de son frère le cloua sur place de saisissement. De quoi parlait-il ?! Orion était bien trop jeune à l'époque pour l'avoir priver de quoi que ce soit ! Le sourire malveillant peint sur les lèvres du Basilic, dont l'apparence n'était pas sans rappeler un fantôme du passé, hérissa Orion. Il se sentit en danger. Non physiquement mais en danger quand même.
Le regard de son frère ramena un sombre souvenir dans l'esprit du chevalier d'or. Cette malveillance, cette morgue... Ils ne les avaient rencontrer que chez un seul individu par le passé : Alessio du Griffon.
C'est donc avec un calme qui cachait mal son émoi qu'Orion répliqua.

- Je n'ai pas le souvenir de t'avoir ôter quoi que ce soit. Es tu revenu dans ma vie pour m'accuser de faits imaginaires ou de rancoeurs mortes avec notre père ? Ou alors me reproches tu de l'avoir tuer avant que tu ne puisses le faire ?

De son oeil valide, Orion posa un air de défi sur son frère. Il n'avait jamais regretter son geste. Par cette action contre-nature, le jeune homme avait non seulement sauver sa propre vie mais également un village d'innocents. Il avait largement payer le prix de son crime mais encore aujourd'hui, il n'avait aucun regret.
Si son frère ne parvenait pas à surmonter sa haine, Orion ferait en sorte de l'y aider. Mais il ne tolérerait pas de telles accusations. Aucune existence ne devait reposer sur un tel désir de vengeance.

- Pourquoi es tu devenu un spectre ? La mort t'a t-elle fauchée trop jeune ou as tu passer un pacte avec Hadès ? Quelque en soit la raison, j'en suis fort peiné...

Althaziel ne bougeait pas d'un pouce. Le face à face avec son jeune frère promettait d’être des plus intéressant. Orion, ou Dimitri avait été marqué par ses allégations. Voila qui jouait en sa faveur.

- Je n'ai pas le souvenir de t'avoir ôter quoi que ce soit. Es tu revenu dans ma vie pour m'accuser de faits imaginaires ou de rancœurs mortes avec notre père ? Ou alors me reproches tu de l'avoir tuer avant que tu ne puisses le faire ?

Un large sourire se dessina sur les lèvres du spectre.

"Je vais répondre à tes questions dans l'ordre mon frère. En effet, le seul reproche que je te fais est d'avoir ôter la vie à Père avant que je ne puisse le faire. Tu as eu la chance de l'avoir à tes cotés durant toutes ces années, et surtout, de le voir périr sous tes coups."

Il partit d'un rire sonore, se répercutant contre les colonnes du Temple. Une nouvelle bourrasque souleva la cape du serviteur d’Hadès.

- Pourquoi es tu devenu un spectre ? La mort t'a t-elle fauchée trop jeune ou as tu passer un pacte avec Hadès ? Quelque en soit la raison, j'en suis fort peiné...

Le vent lui répondit, dans un premier temps. Les deux hommes se toisaient, aucun n'osant bouger.

"Tu dis que tu es peiné ? Qu'as tu ressenti lorsque Père m'a chassé de chez nous, me désignant comme le mal incarné ? Qu'as tu ressenti lorsque je me suis retrouvé seul, sans personne ? Qu'as tu ressenti lorsque tu lui a ôté la vie ?"

Althaziel serrait les poings. Il sentait la rage monter en lui. Son calme permanent laissait place à une vague de sensation incontrôlable. Son cadet était d'un calme olympien, ce qui ne faisait qu'empirer l’état du spectre. Il fallait qu'il le fasse sortir de ses gonds. Il prit une profonde inspiration, refoulant tous ses sentiments au fond de lui. Il fit le tri pour en dégager l'essentiel et se ressaisit. Il bomba imperceptiblement le torse pour se redresser et paraitre ainsi plus grand, et donnant l'illusion d'avoir plus d'assurance que l'instant d'avant.

"Je suis un Spectre, ne t'en déplaise. Et une fois encore, nous sommes les deux faces d'une même pièce..."

Il tendit la main vers son frère.

"Viens avec moi..."

Orion sentit plus qu'il ne vit la haine qui rongeait désormais son frère. Il en conçut une peine sincère mais son pragmatisme étouffa ses sentiments personnels.
C'est donc avec son calme habituel qu'il répondit. Sans hâte, sans passion mais avec sincérité.

- J'ai autant souffert des actes de notre Père que toi. Ton exil fut une blessure dont je mis de trop longues années à me remettre. Même encore aujourd'hui, cette absence me semble une plaie qui ne se refermera jamais véritablement. Que crois tu donc que j'ai ressenti en lui ôtant la vie ?! De la honte, du dégout, le sentiment d'un destin inéluctable peut être... Je n'avais pas le choix. Mais je n'en ais conçu ni joie, ni satisfaction personnelle. La vengeance est ainsi. Elle ronge mais ne s'apaise jamais.

Le chevalier d'or du Bélier dévisagea son ainé. Il avait tant changer... La haine semblait l'avoir rongée de l'intérieur. Restait-il un fond de son ancienne personnalité ? Orion en doutait. Ils semblaient désormais opposé en tout point. Nicolaï fit l'effet d'un miroir déformant. S'il avait laisser la haine le dévorer, Orion aurait-il ressembler à son ainé aujourd'hui ?
Observateur, il perçut un changement d'attitude chez Nicolaï. Ce dernier semblait vouloir se dominer, offrir un visage plus serein. Il se forçait visiblement.

- Effectivement, nous sommes le miroir l'un de l'autre. J'ai choisi la voie de la lumière, du renouveau et toi tu n'as fait que t'enfoncer dans les ténèbres... Même si j'en meurs d'envie, je ne suis pas assez naïf pour croire que tu pourrais changer. Mais réfléchis bien à ce que tu as à gagner et à perdre. Ta vengeance est désormais vaine. Ne penses tu pas mériter un avenir plus radieux que celui qui consiste à servir Hadès ?

Son ainé lui intima de le suivre. Orion hésita. Non par peur ou doute mais uniquement pour éviter que son frère ne pense avoir l'ascendant. Malgré l'amour qu'il lui portait encore, Orion ne se permettrait pas la moindre erreur face à son sang. Sans saisir la main tendue d'Althaziel, le chevalier d'or s'avança de quelques pas et lui passa à coté sans un regard.

- Cet endroit ne te plait donc pas ? Où veux tu me mener ? Je ne me déplacerais pas pour ton bon plaisir.

- Effectivement, nous sommes le miroir l'un de l'autre. J'ai choisi la voie de la lumière, du renouveau et toi tu n'as fait que t'enfoncer dans les ténèbres... Même si j'en meurs d'envie, je ne suis pas assez naïf pour croire que tu pourrais changer. Mais réfléchis bien à ce que tu as à gagner et à perdre. Ta vengeance est désormais vaine. Ne penses tu pas mériter un avenir plus radieux que celui qui consiste à servir Hadès ?

Dans un premier temps Althaziel ne répondit pas. Il reprenait petit à petit de l'assurance. Sous aucun prétexte il ne se laisserait déstabiliser par son frère. De nouveau, il arborait un masque d'impassibilité. Froid, immobile, tenant le heaume de son surplis sous le bras, il toisait Orion.

"En effet, j'ai choisis la voie des ombres et de la mort. Mais ce n'est pas forcement un choix de départ. Moi aussi j'aurais aimé briller. Mais c'est impossible. Ce n'est plus possible. Ma route est tracée et je suis promis à un avenir qui j'en suis sur, te dépasse totalement. Du moins pour l'instant."

Il réfléchit un instant, puis abaissa sa main tendue.

"Ceci dit, je suis sur que tu comprendras. Je ne suis pas quelqu'un de mauvais au fond. Tu l'as toujours su, toi. Pas comme Père qui me voyait comme un démon. lorsque je me suis retrouvé seul, je me suis juré de me venger de lui."

Il haussa les épaules, comme pour signifier qu'au final, c’était sans intérêt. Se décidant à franchir les quelques mètres qui le séparaient de son frère, il s'approcha. Une nouvelle fois, sa cape se souleva, poussée par une bourrasque. Le bruit de ses pas sur le sol dur était couvert par la mélodie du vent. Il se trouvait maintenant à seulement quelques centimètres d'Orion.

- Cet endroit ne te plait donc pas ? Où veux tu me mener ? Je ne me déplacerais pas pour ton bon plaisir.

Il savait que ça ne serait pas facile.

"Disons que ta place n'est pas forcement ici. Certes, tu es chevalier d'Or, j'en conviens, mais je suis sur que tu serais plus à l'aise... en famille. Tu ne crois pas ? Durant toutes ces années nous avons été séparés. Et je t'ai enfin retrouvé. Ne crois tu pas que l'heure est venu d’être de nouveau réellement réunis ?"

Une nouvelle fois, il tendit la main à son cadet. Ses doigts effleuraient presque le métal précieux de l'armure du Bélier.

Orion prit le temps d'analyser l'attitude et les paroles de son frère.
Un véritable masque de froideur, d'inhumanité, de colère glacée. Le chevalier d'or s'efforça d'étouffer la vague de compassion qui menaçait de s'emparer de son coeur.
Althaziel avait choisi sa voie. Qu'il le reconnaisse ou non, son état actuel demeurait consenti. Orion avait également vécu l'enfer et pourtant il avait pris un autre chemin. Nulle excuse, nul pardon ne pouvait atténuer la vacuité de la décision de son ainé.
Lorsque ce dernier reconnut de vive voix l'inéluctabilité de son destin, Orion sentit une froide résolution le saisir. Son serment de chevalier d'or laissait peu de place aux doutes. Depuis que les deux juges lui avaient ôté son oeil, le pacte de non agression entre les troupes d'Hadès et les Saints ne s'appliquait plus.
Les paroles suivantes d'Althaziel confortèrent Orion dans son triste choix. Son ainé tentait de le manipuler, de jouer sur la fibre familiale.
Orion du Cristal s'y serait laisser prendre. Mais pas le chevalier d'or du Bélier.
Lorsque les doigts du spectre s'approchèrent de l'habit sacré, Orion leva une main négligente, comme pour saisir celle de son ainé. Mais au moment où les deux chairs auraient dû se toucher, un éclat doré embrasa la paume d'Orion pour propulser son frère à plusieurs mètres en arrière.


- Tu ne mène pas la danse, mon frère. Comment pourrais-tu mieux connaitre mes sentiments que moi même ? Ce domaine est le mien et je t'y offre l'hospitalité. Une autre chevalier d'or n'aurait pas fait preuve de tant de civilité. Je considère que nous sommes déja réuni ici même. Qu'importe l'endroit où nous serons.

Le chevalier d'or s'avança d'un pas identique à celui de son ainé. Son regard exprimait clairement le combat entre son amour fraternel et son sens du devoir. Mais c'est ce dernier sentiment qui sembla vite prendre l'ascendant.

- Allons droit au but. Quelles sont tes intentions ? Me ralliait à ton sombre monarque ? Si tu éprouves une once de respect et d'affection pour moi, ne prends plus de détour et exprimes toi.

Althaziel heurta un rocher derrière lui, ce qui l’arrêta net. Dans le processus, il avait lâché son heaume qui roula sur le sol. Un sourire orna son visage. Un sourire des plus étrange. Il se redressa et éclata de rire. Un rire dérangeant, qui se répercuta contre la facade du Temple de Jamir. Se penchant en avant, il ramassa le casque de son surplis pour le placer de nouveau sous son aisselle.

- Tu ne mène pas la danse, mon frère. Comment pourrais-tu mieux connaitre mes sentiments que moi même ? Ce domaine est le mien et je t'y offre l'hospitalité. Une autre chevalier d'or n'aurait pas fait preuve de tant de civilité. Je considère que nous sommes déjà réuni ici même. Qu'importe l'endroit où nous serons.

Le spectre planta son regard dans celui de son frère.

"Quelle hospitalité mon chère frère."

Nouvel éclat de rire.

- Allons droit au but. Quelles sont tes intentions ? Me rallier à ton sombre monarque ? Si tu éprouves une once de respect et d'affection pour moi, ne prends plus de détour et exprimes toi.

Une bourrasque de vent s'engouffra dans le Temple. Le temps semblait s'immobiliser, laissant en suspend les deux protagonistes.

"Je voudrais que tu rejoignes mes rangs. Et je dis bien MES rangs. Pas celui des spectres. Tu es la seule personne qui me rattache à mon passé. J'ai besoin de force de frappe. Et tu es quelqu'un, je n'en doute pas, qui possède une force prodigieuse..."

Dans son regard, la dureté. Aucune émotion, aucun remord, rien ne venait le troubler. Juste un pragmatisme à outrance.

"Qu'en penses tu ?"

Orion resta silencieux un long moment. Il jaugeait son frère sans animosité mais sans chaleur. Sans leurs armures respectives, les deux auraient pu sembler jumeaux en cet instant. Un même regard miroir.
Le chevalier d'or étudiait le sens de la proposition de son ainé.
Quelle étrange demande... Assistait-il au premier pas vers la corruption de son être ? Si c'était bien le cas, Althaziel était bien plus naïf qu'Orion ne le soupçonnait au premier abord. Pourtant, cette perspective parut bien peu plausible. Le spectre devait avoir une autre idée.
L'ainé savait manier les mots. Il usait de flatteries et d'un soupçon de lien familial pour attendrir son jeune frère. Le spectre reconnaissait la puissance de son cadet et tachait de mettre leur lien sur le devant de ses préoccupations. Rusé.
Orion finit par lancer d'une voix calme, apaisante mais non dénuée de fermeté.

- Tu sais choisir tes termes. Rejoindre "tes" rangs dis-tu ? Tu devrais pourtant te douter que je ne suis que le serviteur de la déesse Athéna. Des liens qui ne sauraient être trancher nous lie à jamais, je te l'accorde bien volontiers. Néanmoins, mon devoir en tant que chevalier d'or m'interdit de succomber à la tentation que cherche à m'imposer mon affection pour toi. Je ne te laisserais pas me détourner de ma voie.

Sans hâte, Orion avança vers son ainé. Un vent glacial fit voleter sa longue cape blanche dans son sillage. Le chevalier d'or s'arrêta à quelques centimètres de son frère sans détourner le regard un seul instant. Althaziel allait-il sentir le puissant cosmos de son cadet prêt à exploser sous la surface calme de ses traits apaisés ?

- Ce que tu me montres de toi ne me plait guère. Je te le répète une dernière fois... Explique toi sans détour. Pourquoi cette proposition incongrue ? Accepter ton statut de spectre, chercher à te soutenir au nom de nos liens fraternels, tout cela me semble logique. Mais rejoindre tes rangs... Je ne suis pas assez naïf pour ignorer que tu choisis tes mots avec soin. Ne m'obliges pas à te faire disparaitre par amour pour toi. Tu es mon frère et je souhaite que tu ne sois pas perdu au point de m'obliger à te tuer par compassion et par respect pour celui que tu étais jadis.

- Ce que tu me montres de toi ne me plait guère. Je te le répète une dernière fois... Explique toi sans détour. Pourquoi cette proposition incongrue ? Accepter ton statut de spectre, chercher à te soutenir au nom de nos liens fraternels, tout cela me semble logique. Mais rejoindre tes rangs... Je ne suis pas assez naïf pour ignorer que tu choisis tes mots avec soin. Ne m'obliges pas à te faire disparaitre par amour pour toi. Tu es mon frère et je souhaite que tu ne sois pas perdu au point de m'obliger à te tuer par compassion et par respect pour celui que tu étais jadis.

Sentir son frère aussi proche redonna une bouffée au spectre. Qu'est-ce la proximité de son sang ? Son cosmos ou tout simplement sa présence ? Il n'aurait su le dire. Toujours est-il qu'il trouva la situation presque plaisante. Il y a quelques années, les rapports de force étaient inversés. Aujourd'hui, il se savait moins puissant que son cadet. Qu'a cela ne tienne. Il ne cherchait pas a être puissant a tout prix. Par contre, influent oui. Et pour cela, il lui fallait des alliés de poids.

"Je dirais que ce que je souhaite est très simple. Je ne veux pas la guerre entre les spectres et le sanctuaire. Nos deux rangs sont affaiblis et nous n'avons pas besoin de ce genre de querelle. La trêve a été brisée, certes, mais devons nous tous subir les conséquences d'actes irréfléchis ?"

Il scruta l'orbite d'Orion.

"Je sais que tu es le premier a en avoir pâtit. J'en suis conscient. Mais tu sais aussi ce qu'est la compassion... Toi..."

Il choisissait ses mots, comme à son habitude, pesant chacun d'entre eux.

"Je voudrais que nous puissions avoir une sorte... d'armée plus ou moins... commune.Pour que ce genre de chose n'arrive plus."

Et de nouveau ce sourire indéchiffrable...

Althaziel était rusé. Il savait employer la tactique du gant de velours dans une main de fer.
Ses paroles demeuraient mélange de flatterie, de raison. Mais Orion perçut quelque chose en dessous.
Selon le spectre, la guerre entre Hadès et Athéna n'allait offrir aucun intérêt, bien au contraire, aux deux frères. Croyait-il véritablement qu'Orion allait lui faire confiance si facilement ?!
Une armée... Rien que ça. Le chevalier d'or du bélier commençait à comprendre le sens caché de cette conversation. Althaziel cherchait un moyen sûr de trouver des alliés en dehors des enfers dans le but de prendre lui même le pouvoir.
Orion lui tourna le dos pour s'éloigner de quelques pas. Le jeune homme se mit à observer l'horizon et le soleil qui entamait déjà sa descente. Le vent joua avec sa longue chevelure alors que sa voix calme s'élevait de nouveau.

- Tu es ambitieux. Ce n'est pas un défaut. Néanmoins, ne cherche pas à me faire croire que tu agis de la sorte pour un intérêt noble ou élevé. Cette "armée" ne serait rien d'autre qu'une force de frappe à ta solde, orienté vers tes visées personnelles. Je suis le gardien du premier temple du Sanctuaire. Son premier rempart. je n'ai pas le temps de me prêter à tes manigances.

Orion se tut alors, perdu dans ses réflexions. Le paysage était magnifique et Jamir demeurait son refuge. Un lieu où il sentait en sécurité. Il décida donc de s'essayer à une dernière tentative. Si son frêre était véritablement perdu à ses yeux, Orion l'éliminerait sans hésiter à l"instant.

- Tu ne peux probablement plus comprendre. Je sers Athéna par choix et je serais capable de sacrifier ma vie à sa cause. J'aime cette Terre, ses habitants et je la protège aux cotés de mes compagnons. Tu es mon frère et notre lien est important à mes yeux. Mais je ne me prêterais pas à tes manipulations pour autant. Tu as donc le choix. Restez ici à parler en tant que mon ainé ou quitter ces lieux et disparaitre de ma vie. Tu ne parviendras pas à me manipuler mais je serais curieux de comprendre le chemin que tu as parcouru pour devenir ainsi.

- Tu ne peux probablement plus comprendre. Je sers Athéna par choix et je serais capable de sacrifier ma vie à sa cause. J'aime cette Terre, ses habitants et je la protège aux cotés de mes compagnons. Tu es mon frère et notre lien est important à mes yeux. Mais je ne me prêterais pas à tes manipulations pour autant. Tu as donc le choix. Restez ici à parler en tant que mon ainé ou quitter ces lieux et disparaitre de ma vie. Tu ne parviendras pas à me manipuler mais je serais curieux de comprendre le chemin que tu as parcouru pour devenir ainsi.

En effet, pousser plus loin ne servirait à rien pour le moment, Althaziel le savait. Il l'avait du moins compris avec cette dernière réplique de son cadet.

"Bien. Je comprends ce que tu veux dire. Du moins je pense."

Il s'assit sur un rocher, le même qu'il avait heurté quelques minutes plus tôt. Levant les yeux, il observa le ciel. Sa lourde cape volait de nouveau derrière lui. Posant son heaume, un rayon se refléta dans la noirceur des cornes qui l'ornaient.

"Je suis curieux moi aussi. Curieux de savoir par quoi tu es passé pour devenir ce que tu es aujourd'hui. Je ne doute pas que nos chemins aient été radicalement différents. Mais de la a se retrouver dans les camps opposés... Je reste persuadé que nous pouvons, d'une manière ou d'une autre, nous entendre... Du moins en partie."

Personne en cet instant n'aurait pu dire si les paroles du Basilic étaient sincères ou non. Peut être qu'il n'en savait rien lui même. Mais en tout cas, les mots sortirent tout seul. Sans s'en rendre compte, il posa la main sur son casque dans un geste de protection. Son surplis était la seule chose acquise par lui même et qui lui restait.

Althaziel venait enfin de décider de jouer franc jeu. Orion réprima un soupir de soulagement. Eliminer son frère lui aurait déplu même s'il n'aurait pas hésiter. Le chemin parcouru par son cadet intriguait le spectre. Tel un spectateur prêt à assister à un récit épique, ce dernier s'assit en toute décontraction sur un rocher.
Sa réaction amusa Orion. Le chevalier d'or était invité à dévoiler son passé sans que son interlocuteur ne réalise le premier pas. Un soupçon de subtile manipulation ? Qu'importe. Les informations qu'allait dévoiler Orion demeuraient sans conséquences.
Le jeune homme resta debout, droit et stoïque. Par cette seule position, il tenait à démontrer de manière symbolique qu'il restait dans son domaine et qu'il demeurait donc en position avantageuse. Contre un individu aussi retors que son ainé, ce type de détail pouvait s'avérer important. Un jeu malsain probablement mais Althaziel semblait ne pas connaitre d'autres modes de communication.

- Comme tu le sais, j'ai été contraint de tuer notre père. Par la suite, j'ai pris la décision de m'isoler dans une masure non loin du village le plus proche du manoir familial. J'y ais vécu quelques années en tant que protecteur des habitants de ce hameau. Durant ce laps de temps, j'ai approfondi mes connaissances dans la lecture des astres. Je suppose que Mère t'en avait fait la démonstration à toi aussi. Elle lisait l'avenir comme personne...

Orion se tut quelques instants. Le décès de leur mère demeurait l'une de ces blessures qui ne pouvait être refermer malgré les années. Malgré la douleur, le chevalier d'or reprit d'un ton neutre.

- Voilà un peu moins d'un an, je me suis retrouver enseveli sous une avalanche avec deux enfants du village. Je suis parvenu à les sauver en risquant ma vie et c'est là que l'armure d'argent du Cristal me fut envoyée. Voilà une partie de mon passé. Et toi alors ? Comment as tu succomber aux promesses de l'empereur des ténèbres ?

Le jeune homme avait essayer de retirer toute pointe de reproche de son ton. Il avait omis sciemment toutes les épreuves qu'il avait traverser en tant que chevalier d'argent. Il ne faisait pas assez confiance à son frère pour lui en révéler davantage. Pour l'instant.

Malgré les révélations d'Orion, son frère ne semblait pas loquace. Il restait le regard vague, peut être guider par une intense réflexion.
Piqué au vif, le chevalier d'or réalisa qu'il n'avait pas toute la journée à consacrer à ces retrouvailles. Si Althaziel préférait garder le silence pour l'instant, ce n'était pas Orion qui allait lui tirer les vers du nez. Le jeune homme était prêt à parier qu'ils se reverraient bien assez tôt.

- Soit. Lorsque tu auras pris la décision d'avoir un réel échange avec moi, tu sauras où me trouver.

Milan n'allait probablement pas tarder à atteindre l'île de la mort où l'avait convoquer Orion. ce dernier ne tenait pas à faire atteindre son disciple plus que nécessaire. C'est donc sans un mot de plus qu'il se détourna de son sombre frère pour s'éloigner de quelques pas vers le rebord d'un pan de la montagne. Sa silhouette commença alors à disparaitre dans un nuage d'étoiles.
Le chevalier d'or du Bélier était appeler ailleurs pour que Milan puisse à son tour obtenir l'habit qui lui revenait s'il réussissait les épreuves à venir.