[Tournoi Bis]8eme de finale:Alessio du Djinn VS Chico du Dragon

Ce que représentait cette participation pour Alessio ? Une opportunité facile d'atteinte de se battre et de vaincre au nom de la déité qu'il prétendait défendre par sa condition de Spectre. Quel meilleur moyen que de terrasser des impies, récalcitrants à la suprématie ténébreuse, pour faire montre de son attachement envers le clan infernal l'ayant accueilli en son sein après tant de siècles passés à succomber incessamment sous la torture dans une boucle sans fin. C'était également l'occasion rêvée pour se familiariser plus avant avec les facultés acquises en rejoignant les rangs des soldats de l'obscur, d'éprouver son répertoire de compétences personnel sur une cible bien vive – même s'il escomptait en toute franchise qu'elle ne le reste pas bien longtemps une fois qu'il aurait croisé sa route. Il allait s'illustrer dans le sang et la douleur de ses proies et gravir les échelons vers les nues, sans se préoccuper du prestige des adversaires qu'il devrait broyer pour y arriver. Il allait finir par se sentir nostalgique, et amalgamer cette situation nouvelle à son existence terrestre à sillonner les plus rouges des champs de bataille.

Son surplis n'était pas sans lui rappeler sa cuirasse de l'époque, bien que plus encombrant – et nettement plus esthétique en contrepartie. S'y accoutumant encore, ne maintenant pas son port en toutes circonstances comme certains, l'inconfort était de mise à l'aube de son premier affrontement, mais cela ne l'empêcherait pas de dévoiler progressivement toute la mesure des pouvoirs que recelait son être, renforcés par le biais de cet apparat d'obsidienne qu'il s'était hâté d'endosser lorsque l'appel fut fait pour prévenir les protagonistes de leur proche entrée en scène. Quittant la vaste salle l'accueillant dans le cadre de ses ultimes préparatifs précédant le combat, étant demandé par un public avide de toujours plus de barbarie dont l'excitation grandissait à l'approche des nouvelles blessures qui allaient être échangés... Fermant les yeux, il se crut revenir dans le tumulte d'une charge d'infanterie à l'encontre de ses premiers ennemis, lance au poing, prêt à transpercer de part en part ces ridicules résistants s'étant crus à la hauteur de l'armée romaine, et de l'empire sous la bannière duquel elle se battait avec fierté. Paré de son éternel sourire énigmatique, il emprunta donc la route menant à l'arène, prêt à la fouler au pied pour faire connaissance avec l'être qu'il prendrait plaisir à déchiqueter de ses propres mains aussitôt que le coup de départ aurait été donné.

C'était une bonne surprise qui l'attendait une fois surgi au grand jour ; son antagoniste n'était autre qu'un chevalier d'Athéna, un de ces Saints naïfs et dégoulinant de mièvrerie et de bons sentiments, tant et si bien que la pureté de l'aura du Dragon manqua de le faire hoqueter de déplaisir. Quel meilleur jouet à dépiauter que ceux avec qui eux, Spectres, se défiaient depuis une éternité ? La lumière et les ténèbres se retrouvaient à nouveau face à face par leur intermédiaire, et cela promettait de donner lieu à un match aussi palpitant que d'une barbarie sans égal. Son rictus s'agrandit, et il porta nonchalamment une cigarette à ses lèvres, l'allumant sans plus tarder. La nappe grisâtre qui se dégagea de son extrémité en pleine combustion se déploya librement, n'étant pas plus contenue que son cosmos occulte qu'il venait de relâcher, une pellicule violacée grandissant paresseusement autour de sa silhouette. Bien que ne pouvant encore conséquemment influencer le dégagement de son aura, il eut été aisé de rendre son jaillissement plus intense, plus agressif. Mais non. C'était tellement plus satisfaisant de prendre le rôle du reptile serpentant entre les arbres, rôdant autour des pieds du malheureux ayant commis l'erreur de s'aventurer sur son territoire, se pourléchant les babines et affutant ses crocs en attendant la moindre ouverture pour se jeter sur lui et lui infliger une morsure fatale. Un coup de crocs qui instillerait en lui le poison... Poison qui n'était rien de plus qu'une peur si oppressante qu'elle serait palpable.

La perspective de le voir se tétaniser était des plus réjouissantes, et Alessio n'avait que trop hâte d'entamer ce duel pour en venir plus vite à cette inéluctable finalité. Le coloris d'améthyste de l'émanation se mêla au tabac consommé dans une danse tranquille, d'une beauté subtile... Son vis-à-vis aurait-il la décence de la saisir ? Il en doutait. Ce n'était qu'un de ces misérables défenseurs du Sanctuaire, en définitive... Mieux ne valait pas trop en demander de sa part, au risque d'être déçu.

« Tu ne crois pas si bien dire... » répliqua-t-il d'une voix à la fois mielleuse et sifflante, sous-entendant clairement son point de vue sur le meilleur d'entre eux.

Il ne pouvait en être autrement, alors autant mettre en évidence ce qui doit l'être pour que la désillusion ne traine point la patte. Écartant négligemment les bras pour offrir sa vulnérabilité en pâture de l'animal mythique que devait illustrer son interlocuteur, ne perdant rien de son expression moqueuse alors que l'on attendait d'eux un massacre digne des plus grandes guerres ayant affecté le monde de leur ampleur disproportionnée et de leur nombre de victime ahurissant. Des présentations ? Pourquoi faire ? Si ce n'est pour connaître le nom de son bourreau, celui qui allait lui faire connaître les joies de l'éternelle damnation, de la mort d'un supplicié, celle qui n'en fait rien de plus qu'un soulagement... Cet homme ne savait pas ce qui l'attendait, et c'était préférable pour sa santé mentale : au moins pourrait-il encore l'entretenir le temps d'être mis à terre...

La réponse par l'affirmative du chevalier de bronze ne fit que confirmer sa pensée selon laquelle tous les individus léchant les pieds de la déesse du bien étaient des abrutis finis. Il n'y avait qu'à voir la façon d'obtempérer de cet écervelé à la demande d'un ennemi qui ne faisait que l'inviter à se jeter tout droit dans la gueule du loup, ce qu'il fit avec un brio non dissimulé. Cette impétuosité était l'apanage de la jeunesse et du manque d'aguerrissement, ce qui illustrait bien mal la mythique chimère dont cet assaillant était l'icône. Certes, cela allait faire encaisser quelques offensives à Alessio, mais n'était-ce pas le prix à payer pour rentabiliser au maximum cette condition volontaire d'appât ? Amadouer était un art, et il en connaissait la quintessence. Ce que ne semblait pas avoir discerné son interlocuteur, pour ainsi foncer tête baissée sans prendre garde à la menace que pourrait représenter une telle charge... Il ne réaliserait son erreur que trop tôt. Projeté par l'accumulation des coups, que couronna l'attaque pétrie de cosmos mettant fin à cette prise d'initiative fortement déraisonnable.

Déplaçant imperceptiblement les parties du corps ciblées pour minimiser l'impact des coups physiques, le Spectre mijotait d'ores et déjà sa réplique, qui s'annonçait terrible et pourrait bien avoir raison de ce valeureux suicidaire. Revenant à sa hauteur d'un pas tranquille, ne montrant aucun signe d'animosité, il se contenta de se recoiffer soigneusement pour éviter que ses mèches ne viennent gêner sa vision. Il eut été rageant de rater un coup mortel du à une erreur de balistique dont la seule cause serait son abondante masse capillaire... Ce sombre obstacle optique écarté, et tout embarras possible lui étant du en sa compagnie, le Djinn pouvait s'y mettre, et il ne comptait pas ménager ses forces pour en finir sans s'attarder. La torture eut été une option distrayante, mais en poursuivant cette compétition, il avait toutes les chances de trouver des opposants autrement plus amusants à charrier de la sorte... Que ce soit moralement ou physiquement, cela va de soi. Goguenard, il ne put s'empêcher de glousser pour toute réponse à ce commencement faiblard. Si c'était là toute l'étendue des pouvoirs de ce malheureux, on pouvait sans conteste annoncer qu'il ne ferait pas long feu. Si le romain n'était pas le plus ancien possesseur de pouvoirs parmi les siens, il en avait tout de même une certaine maîtrise, et leur ampleur était sans commune mesure avec cette pathétique onde de choc.

« Fais attention, c'est dangereux... Tu aurais pu me blesser ! » railla-t-il.

Ce faisant, il voulut le soulever de terre d'un uppercut porté à l'estomac, repliant aussitôt le bras pour contourner le corps éventuellement laissé en lévitation par cette entrée en matière pour lui destiner un coup de coude en pleine épine dorsale. Quoi de mieux pour semer la confusion dans son esprit que de l'assommer si brutalement ? L'aspect fluet du représentant des enfers n'était pas représentatif de sa force physique excessivement travaillée depuis son service militaire lors de sa vie terrestre, et quels que soient ses opposants passés, présents et futurs, ce n'était pas tous les jours qu'il encaisserait des impacts de cette importance sans qu'ils ne soient renforcés d'une injection d'aura. Sans le laisser véritablement retomber, il passa sa jambe droite derrière les siennes pour le frapper à l'articulation des genoux, visant expressément dans le pli pour illustrer par avance la façon dont ce saint antagoniste allait s'incliner devant sa personne. Donnant suite à cet enchaînement, il fit tomber son mégot pour mieux balayer les débris rescapés de l'équilibre de son ennemi naturel, finissant par se cramponner à son visage à pleine main, pesant de tout son poids vers l'avant pour lui frapper l'occiput contre la surface de combat.

Si ce déferlement au corps à corps fonctionnait sur toute la ligne, ça allait handicaper fortement le servant d'Athéna pour la continuité de ce match. Prenant ses dispositions en s'écartant de la silhouette qu'il venait de marteler avec adresse, le fratricide joignit les mains, singeant une prière. Le halo énergétique violacé dansant autour de son corps parut alors se mouvoir brusquement pour alourdir l'atmosphère tandis que sa quantité se concentrait entre ses paumes reliées, donnant naissance à une arcane de haute volée qui ne pouvait décemment pas paraitre rassurante pour quiconque, même les plus simplets. Ce naïf comprendrait-il finalement qu'il n'avait pas affaire à un plaisantin ? Inclinant brusquement ses poignes mise en contact vers le bas à l'extrême, il les écarta ensuite avec lenteur, comme présentant une donation. Un cadeau empoisonné... Entre ses doigts prenait forme un vent ensablé extrêmement dense, qui, aussitôt révélé au grand jour, se mit à croître jusqu'à prendre un volume démentiel qui engloba toute la zone dans son souffle aride. Plus que cette tempête, c'était la furie du désert qui s'y joignait qui allait faire mal... À moins d'un miracle, le dragon allait gagner de l'altitude à n'en plus finir pour ensuite rejoindre le sol, et pas sans mal. Heureux de ne pas en être affecté par son contrôle sur cette catastrophe naturelle simulée, il afficha un rictus exubérant, tirant sur sa cigarette une fois placé en spectateur le temps que la tornade retombe... Et que son possible passager suive son exemple.

Etait-ce là toutes les prouesses dont contes et légendes vantaient les mérites ? Le pouvoir de cette bête mythique qu'était le dragon se résumait à ces pathétiques et vaines tentatives de percer une défense bien au-delà de ce pouvoir bien plus misérable que prévu ? Ces ruées avaient certes une certaine capacité destructrice, mais ce n'était pas avec cette arcane à la lamentable faiblesse que Chico pourrait altérer la bonne santé de son vis à vis. Celui-ci ne pouvait que ricaner devant tant d'impuissance, tout en appréciant l'efficience de ses propres techniques, avec lesquelles il en était encore à faire connaissance. Ce qui ne l'empêchait pas d'en donner la pleine mesure, comme l'avait corroboré le typhon sablonneux qu'il avait relâché à l'encontre de cet ennemi de piètre formation.

Son précepteur ne devait guère être digne d'éloges, si tout ce qu'il avait pu inculquer à ce garçon se limitait à ces piqures de moustiques bourrées d'aura n'ayant plus de puissance que celle de charmer les visions grâce aux effets lumineux les accompagnant. Quelques étincelles verdâtres qui picotaient, arpentant ses membres après un choc loin d'être insurmontable... Il avait beau ne pas être initié en profondeurs aux détails relevant du pouvoir cosmique et de ses déclinaisons, il était certain de ne pouvoir être terrassé par ce heurt énergétique de basse amplitude, quand bien même il serait répété à n'en plus pouvoir. Si cet antagoniste poursuivait sur ce rythme décadent, il aurait tôt fait de ne faire qu'une bouchée de ce joyeux naïf s'acharnant sans obtenir de résultats probants. Et pour cause. Alessio ignorait si cela était du à une erreur d'évaluation de la part du chevalier de bronze à son sujet, mais cela risquait de lui coûter cher, et promptement.

D'autant plus qu'à la différence de ce valeureux larbin d'Athéna, il n'avait aucune vertu à défendre, et ne pas représenter les forces du bien et tout le positivisme et la sensiblerie qui les ornementaient était un avantage incommensurable sur cet innocent zélote prêchant la grandeur de la pureté. Balivernes, et le romain comptait bien en faire la démonstration par ses pouvoirs obtenus d'une bénédiction maléfique. Il avait été déchu, damné, mais cela avait apporté à ce corps maintes fois brisé pendant les années de sévices qu'il avait encaissées une force dépassant l'imagination, et les rêves les plus fous qu'il avait pu nourrir par le passé. En plus de le galvaniser sous l'égide de ce monstrueux potentiel que lui avaient conféré les forces occultes, la note d'exotisme qui se dégageait de son répertoire des plus variés pour un novice n'était pas pour lui déplaire, et il se sentait merveilleusement bien à chaque nouvel usage de ce flux nébuleux circulant dans ses veines, second sang matérialisant l'impulsion ravageuse qu'il pouvait tirer de son âme.


Plus que réellement influente sur son état physique, la frappe mystique du Saint n'avait fait que l'expulser dans les airs, donnant lieu à une splendide descente en piqué qui ne décontenança aucunement l'étoile céleste. Ne dit-on pas de nos jours que l'art de la guerre se caractérise avant tout par une mainmise sur chaque territoire, à commencer par la voie aérienne ? Cette position était propice à de nouvelles expérimentations d'une infaillible sournoiserie. Convoquant ces bottes secrètes assoupies au fond de son être, il fit son choix entre celles dont il n'avait pas encore fait la découverte, qui s'avérait particulièrement adaptée à cette nouvelle perspective offensive.


Le bras braqué dans la direction de son opposant n'ayant eu à loisir de se déplacer, il le désigna de sa paume, forçant sa concentration à un degré extrême. De ses propres expertises, il avait fini par élaborer qu'il devait se focaliser sur ce qu'il voulait atteindre en le visualisant si intensément qu'il ait l'impression de le chauffer à blanc. Cette mise à feu se transmettait alors au halo ténébreux ondulant autour de sa silhouette, qui répondait à ses attentes et donnait corps à ces attaques aussi impitoyables qu'il pouvait l'être. Exigeant une nouvelle manifestation de ce courant interne, il donna forme à un cimeterre richement ouvragé entièrement fait de ce scintillement maléfique l'englobant, ne l'empêchant pas d'acquérir toutes les propriétés d'une version standard en y ajoutant la virulence de ses émanations paranormales.

Projeté à toute allure sur son ennemi dans une descente fulgurante, ce dernier serait sans nul doute écorché s'il venait à ne pas pouvoir contrer ce coup d'estoc ne demandant point d'intervention de la part d'un escrimeur. Récupérant sa stabilité en touchant le sol, le Djinn se saisit de l'arme fictive avant qu'elle ne s'évapore et porta un coup à chacun des membres de celui qui avait eu le malheur de l'affronter, voulant percer en profondeur plus que sectionner véritablement. Plus il l'handicaperait, meilleure la suite serait. Sentant la consistance de son instrument martial partir en fumée, il acheva cet habile enchainement d'un coup oblique ayant pour objectif de zébrer de long en large le tronc de cette innocente victime. Récupérant toute la liberté de ses mains, il passa le pouce sur sa lèvre fendue et ensanglantée, effaçant le sillon rougeâtre qui maculait sa chair halée... Ce parfum ferreux qu'était celui de l'hémoglobine était également celui de cette bataille symbolique.

« Puisque tu y tiens, je suis Alessio du Djinn de l'étoile céleste du Rêve ! » siffla-t-il, l'air mauvais, ourdissant probablement quelque sale coup à administrer à son modèle de bienveillance de partenaire de rixe.

Les imprudents essais du spectre ne furent pas sans douleur pour son infortuné adversaire, cobaye malgré lui de ces premières frasques hautes en couleur. Se fier à un nouvel « équipement » tel que ce surplis et la panoplie d'attaques d'origine mystique allant de pair avec son design lugubre était déstabilisant, mais aussi incroyablement galvanisant pour Alessio, qui se laissait aller à une joie modérée en procédant à ce coup d'essai. Sa puissance encore mal contrôlée faisait des ravages, aussi bien sur la surface de combat qu'à celui qui devait s'opposer à lui, et il n'était que trop heureux de découvrir à quel point ces nouvelles armes le rendaient incroyablement meilleur que de son vivant. Simple fantassin d'alors, il était un guerrier aux pouvoirs démentiels aujourd'hui, et il comptait bien user de la pleine mesure de ces forces dernièrement émergées pour réduire en charpie ce pitoyable soldat du bien qui se voulait être un barrage sur sa route naissante. Celle d'un homme ambitieux et visant plus que haut, qui comptait bien figurer un jour au sommet de ce panthéon dont on lui avait tant et tant rabâché les oreilles. Mais pour cela, il fallait commencer par écraser les insectes bourdonnant qui venaient troubler sa quiétude, et ce avec tout le prestige revenant à quelqu'un prétendant à cette hauteur démiurgique.

Par pitié plus que par égard pour l'androgyne qu'il massacrait avec préméditations, il avait cédé son nom pour que cette première victime d'une seconde génération puisse l'emporter dans la tombe et le maudire de toute son âme. Cette rancœur ne pourrait être que la marque de la quintessence maléfique qu'il avait atteinte par la faute de ceux qui avaient jalonné sa route dans cette bonne vieille antiquité. Le sang qu'il ferait couler serait de quantité bien plus importante que celui des opposants qu'il avait fait passer de vie à trépas jadis, au point d'en faire le versant d'une rivière sans fin, car il ne comptait avoir aucune retenue dans ses pulsions meurtrières... Quiconque se mettrait devant lui finirait impitoyablement déchiqueté. Ses pas devaient s'orienter perpétuellement vers l'avant, car reculer signifie disparaître. Il allait s'enfoncer parmi les ombres, plus profondément que quiconque, et absorber toute leur essence pour en ressortir grandi et plus effroyable que jamais. Car son règne allait bientôt commencer... Rongé corps et bien par cette folie des grandeurs, il se releva, chancelant légèrement.

Le contraste entre la dernière salve reçue et les précédentes était abasourdissant et il n'avait su s'en prémunir dans son intégralité, ne s'attendant pas à ce regain de pugnacité. Néanmoins, il avait su trouver dans ses arcanes des vertus défensives au moment crucial et avait érigé un dôme d'obsidienne parsemé d'étoiles scintillantes quand l'onde de choc l'avait percuté, réduisant sa virulence, mais n'en avait pas été sauvé pour autant. Son rempart avait fini par céder, laissant à son architecte le soin de recevoir ce qu'il n'avait pu arrêter. Frustré de ne pouvoir tout absorber, il avait alors porté à une vitesse folle une pluie de coups centrés sur le visage de son ennemi, pour altérer sa lucidité. Ce qui n'avait pas empêché son envol... Ricanant faiblement, il avait repris une posture présentable, passant sa paume ganté sur un visage désormais teinté du flot carmin de son propre sang venu ourler de sa fluidité macabre son derme basané. Cette texture... Cette couleur... Cette odeur... Tout n'était que trop enivrant et faisait défiler devant ses yeux une flopée d'images découlant d'une réminiscence qui le ramenait à l'épicentre du carnage, alors qu'il dépeçait et éviscérait à tour de bras en agitant cette chère lance qu'il avait repeinte de pourpre à force de percer ces corps dissidents. Effaçant toute trace d'animosité de son faciès, le romain laissa une complète politesse s'instaurer sur ses traits alors que l'atmosphère sauvage de cette lutte retombait, sous les quolibets des spectateurs qu'abattait la déception.


D'un sourire radieux, il fit mine de tendre une main amicale à l'esclave d'Athéna en signe de paix. Cependant, il se mit à onduler le poignet, décrivant de larges cercles comme s'il souhaitait former une nouvelle tempête par ce mouvement des plus intriguants. C'est alors qu'une forme se mit à paraître, correspondant au tracé de cette dextre habile ne s'écartant pas même d'un centimètre de la course qu'il lui était donné de suivre. Progressivement, ce dessin aérien devint plus ovale que rond, et s'allongea encore pour prendre possession d'une hanse et d'un bec verseur qui finissaient de lui donner l'allure d'une ancestrale lampe à huile comme on pouvait en acheter partout dans certains territoires orientaux, en guise de relique souvenir. La différence de celle-ci était qu'elle suintait de mille et un sortilèges parmi les plus diaboliques, le tout s'enveloppant d'un cosmos d'une noirceur exceptionnelle. D'un coup, son aura refit surface de tout son poids, écrasante. La gravité parut doubler pour tout un chacun alors que cet objet devenait d'un magnétisme surnaturel, hypnotisant.

Plus que cela, c'était une attirance magnétique... Si intense qu'elle finit par happer brusquement le corps de son antagoniste au grand complet, en faisant l'habitant de cette modeste demeure que l'on prêtait aux génies... Ou au Djinn. Quoi de plus logique que d'avoir conféré au spectre de l'étoile céleste du rêve, qui en était le représentant, une attaque si étroitement liée à la légende de son surnom pour être sa botte secrète ? Souhaitant faire durer le plaisir et infliger un supplice de taille à ce pantin sacrificiel mis à mort en son nom, il avait spécifiquement rendu plus agressive la capture afin de lui nuire autant que faire se peut. Cloitré dans cet espace confiné d'une dimension étriquée, comment ne pas prévoir que ce bon samaritain serait broyé sans répit jusqu'à demander grâce, et plus encore ? L'ancien légionnaire n'avait qu'un souhait... Que son prisonnier souffre de claustrophobie.

Enfin, ce pathétique naïf se mettait à sortir ses tripes pour occasionner un maximum de casse chez l'infant de la géhenne. Aucun signal ne pouvait laisser penser que cette décharge de rage inespérée renverserait l'ordre établi par les premiers coups, mais personne ne pouvait sortir indemne d'une salve si intense. Alessio lui-même devait le reconnaître, cette nouvelle frappe était d'une force inouïe, et même sa sensation de toute-puissance n'annula ni n'atténua cette déferlante viride aveuglante. Bien que la honteuse lenteur de cette botte lui laisse tout le temps de la feinter, le romain n'en fut pas moins sa cible, percuté de plein fouet par l'essor exceptionnel de cette centaine de projectiles s'étant mus sous la forme d'animaux aussi mythiques que fictifs. Ce n'était que du cosmos condensé et façonné comme on le ferait d'une boule d'argile, pour prendre un aspect qui le rendrait aussi impressionnant qu'il était incisif. L'image ne changeait pas sa vigueur : ce fut un déluge de douleur que ne retint qu'infimement la cuirasse d'obsidienne enveloppant la silhouette avantageuse du légionnaire, le surprenant par une réminiscence de son décès sous les coups d'une pluie de lances le perforant de toutes parts.

Que ces formes serpentines se jouent de son corps à l'aide des crocs proéminents dépassant de leurs terrifiantes mâchoires, défilant en un flux continu, comme s'il s'enfonçait en profondeur dans les rangs d'une armée ennemie au mépris des coups reçus de chacun de ceux en composant les innombrables rangs. Une expérience au moins aussi enrichissante qu'elle s'était montrée blessante, l'inondant par son propre sang en un écoulement carmin omniprésent. Toute parcelle de chair rendue visible était recouverte de ces éclaboussures macabres, alors que quelques pièces de son armure se fracassaient au rythme d'un bruit de brisure qui fit suite à l'assaut torrentiel. Toujours debout, mais pour combien de temps ? Esquissant un sourire goguenard malgré ses plaies béantes, le spectre porta une cigarette à ses lèvres fendues en un large rictus, l'agrémentant de faibles nuages de fumée qui lui donnèrent le second souffle dont il avait besoin, compressant ses pulsions sanguinaires. Quelques craquelures marbrèrent son surplis, annonçant une proche destruction si les frappes échangées conservaient cette ampleur démentielle qui faisait trembler le stade. Tout n'était plus que chaos : sous leurs pieds, tout était ravagé, tout bonnement explosé par la pluie de coups que chacun attribuait à son vis à vis au fil de cette discussion qui n'en finirait pas.

Comment pouvait-on concevoir possible de convertir à des us qui ne sont que l'extrême inverse de tout ce qui habite l'autre ? Prêcher un sourd ne menait qu'à un gaspillage de salive pur et simple, et le Djinn se demandait quand son antagoniste allait finir par s'en rendre compte – si la chance faisait que cela finisse par arriver. Il n'avait pas mis longtemps à comprendre que la candeur et l'espérance caractérisaient ce punching-ball blindé qu'on lui avait remis lors de son entrée sur le terrain, et prenait un plaisir malsain à le décevoir au fil de ce qu'il infligeait, si bien moralement que physiquement. Si sa forme allait en étant nivelée vers le bas, son ennemi ne respirait pas la santé non plus, et les prochains échanges seraient déterminants pour l'issue de ce pancrace bestial – surtout à cause du dragon, en fait. La logique ne s'était pas éloignée tant que ça, dans l'absolu. Les palabres de l'opposant ne faisaient qu'aller en son sens, et le renforcer dans sa détermination qu'il ne pouvait être terrassé maintenant qu'il avait reçu de tels pouvoirs. Il n'était pas n'importe qui. Il avait été choisi. Il était un élu, fait pour mener son ascension jusqu'au panthéon. Il serait le maître. Et son règne allait bientôt commencer... Contrairement à ce que semblait croire le dénommé Chico, ce combat serait des plus symboliques. Ce serait la première brique posée pour le royaume qui s'étendrait à ses pieds quand il serait à son apogée. Celle du château depuis lequel il dominerait ses loyaux sujets depuis sa place de divinité.


Se déplaçant à vive allure, il fit percuter à sa paume la colonne vertébrale du protecteur de la déesse, visant l'épine dorsale pour l'affecter dans le meilleur des cas. Son pied prit bientôt le relai, avant qu'un nouveau balayage ne tente d'allonger sa proie. Se saisissant alors de chaque bras, il se mit à presser de la semelle sur le corps soumis. Déboitement ou fracture ? Lequel viendrait en premier ? Un air satanique s'était affiché sur ses traits, mais s'évanouit hâtivement. Conclure de la sorte n'était pas à sa hauteur. Il y avait bien plus esthétique. Suivant cette perception, il reprit sa position initiale, espérant avoir tout de même donné une leçon à ce protagoniste se montrant excessivement confiant après avoir lâché tant de traits reptiliens. Mais même sous le nombre, le centurion du passé n'avait pas daigné plier.. Le lien retenant sa chevelure avait cédé sous la dernière pression dont il accusait le coup et sa tignasse s'éparpillait sur son visage, en une série de boucles couleur corbeau qui ne faisaient que davantage ressortir le coloris de ses yeux et l'ébène de son cosmos. Son pouvoir, bien qu'amoindri, était toujours à même d'écraser sa cible comme on le ferait d'une fourmi.

Sa mort serait un message, une missive destinée à Athéna. Celui qu'elle pouvait dès à présent cesser de dormir, car Hadès n'était pas la seule menace qu'elle aurait à craindre en personne. D'autant qu'il doutait fortement que nul autre au sein de l'armée des morts au service du sombre monarque ne brigue de s'élever un jour parmi les plus grands. La suprématie des dieux était si indiscutable que tous ne pouvaient qu'en faire un emblème de panache et de prestige. C'était le but ultime, un achèvement, un fin, celle de toute ascension car nul ne pouvait aller plus haut. La mise à mort de ce pitoyable chevalier ne serait qu'un exemple à prendre de sa conviction pour parvenir à ses fins. Relevant la main à hauteur de son visage, il reprit tout son sérieux, faisant quelques flexions pour être sûr que sa mobilité n'était pas touchée par les multiples attaques dont il avait fait l'objet. Il serait dommage que sa technique ne soit pas exécutée à la perfection à cause d'une entaille à l'articulation, ou quelque autre dysfonctionnement de nature corporelle. Un craquement de ses phalanges finit de lui confirmer leur réactivité avant que son aura ne vire au beige, tendant vers l'orangé. La couleur du sable. Du désert, brûlant et mortel.

Un de ses camarades de promotion étrangers, de son vivant, chantait régulièrement une mélodie d'origine arabique. S'en rappelant, il se mit à fredonner sur une cadence semblable, allant de concert avec les bourrasques se levant à son commandement. Pour avoir enduré une première fois ce souffle ardent, le saint de bronze pouvait savoir à quoi s'attendre, pour peu qu'il soit doté d'une pertinence située dans la moyenne. Il ne fallait pas être bien rusé pour identifier ce qui allait s'abattre quand on avait déjà du s'y opposer de front pour ne pas succomber à la violence du cyclone. La tornade sableuse reprit forme, tourbillonnant à toute vitesse, adoptant la brutalité des typhons les plus médiatisés et ravageurs. Au point de forer le sol sous son passage, faisant voler les dernières dalles sous les glapissements de crainte du public, hésitant entre sa protection et la surveillance des hostilités tant l'action battait son plein. Les gradins étaient comblés jusqu'à la dernière place, et pas un de ces spectateurs ne regrettait d'avoir fait le déplacement, même si la peur était plus au rendez-vous que la réelle admiration. Ce n'était même plus de la frayeur... C'était de la beauté. Une admiration phobique. N'était-ce pas là le propre d'une entité supérieure que de savoir charmer ses fidèles même dans le cataclysme ?

« Tu n'as pas tort ! Finissons-en ! Meurs sans peur, ton cadavre sera la première pierre du futur que je vais me bâtir ! »

Répondant à l'appel de son maître, la tornade redoubla d'intensité, son bruissement venteux se métamorphosant en un bruyant rugissement égalant sans mal celui des grands rois de la savane dans toute leur splendeur. Un cri déchirant, vrillant les tympans de tous ceux qui pouvaient l'entendre. Un hurlement plaintif égal à celui que pousserait très bientôt le captif de ce phénomène prédateur emplissant l'atmosphère de son contenu sableux. Ce n'était que le commencement... Le début de la fin...

Pour un soldat de piètre envergure comme c'était son cas, Chico s'avéra étonnamment coriace, et s'en débarrasser n'était pas aussi simpliste qu'avait pu le penser son bourreau. Un cafard. Quelle autre comparaison faire d'une forme de vie inférieure menant une résistance aussi stupide que futile ? Qu'importe, son agonie n'en serait que plus longue et douloureuse, et ses plaintes larmoyantes viendraient rappeler ses propres supplices à la sixième prison à l'étoile céleste du rêve. Pourquoi ce pitoyable corps ensanglanté se relevait-il encore, envers et contre tout ? Pourquoi ce suppôt du bien n'acceptait-il pas de trôner à terre, baignant dans son sang, et de s'y reposer pour ne pas écouler par ses vaines gesticulations les dernières gouttes coulant dans ses veines saignées par la pléiade d'entailles qui décoraient sa peau, le rendant presque écorché vif tant leur nombre était ahurissant ? Sa persévérance n'était même plus honorable, ce n'était que du dégout que cette silhouette massacrée inspirait à Alessio, qui avait pris un sournois plaisir à détruire à ce point son ennemi. Contrairement à la philosophie positive que prônait son antagoniste, celle du mal était bien plus luxuriante et pouvait même se montrer contagieuse. Que ce soit en instillant le doute, la peur, l'incompréhension...

Son imparable poison migrait dans le corps de son hôte involontaire et perturbait son esprit de pensées superflues le noyant dans un flot virant à l'obscur. La pollution de la noirceur était une agression d'autant plus perverse qu'elle relevait du psychique, et ne pouvait donc ni être parée, ni résolue, si ce n'est avec du temps et de la patience à moins de connaître l'affreuse déchéance d'une amnésie. Force était de reconnaître qu'il fallait alors souhaiter au « fiévreux » de la maintenir le plus longuement du monde pour ne pas avoir à enfoncer la tête sous l'eau ténébreuse de cette part d'ombre saupoudrée sur un cœur trop sensible à cette infection manipulatrice, le plaçant en proie idéale d'une folie progressive qui aurait tôt fait de lui faire perdre le sommeil. Son bouclier était prétendu incassable mais les manipulations du spectre qui en feraient un pantin subjugué par l'indécision étaient une flèche portée en pleine poitrine que tous les remparts du monde ne sauraient arrêter. Pourquoi se fatiguer en s'éreintant à ne s'en prendre qu'au corps quand la tête est infiniment plus faible et fragile, pouvant voler en éclats d'une pichenette si son auteur sait la placer au mieux ? D'autant que la protection rattachée à sa cuirasse en bien mauvais état n'était pas d'un grand secours quand l'offensive passait par une tempête, un enfermement compressé ou un recours en plus de ceux-ci comme pouvait en faire jaillir l'apôtre maléfique. Le combat touchait à sa fin, et cette fin serait de son côté, de même que les dieux veillant sur ce duel hérité de leurs pairs et de leurs ainés et que l'avantage.

Si les soins médicaux étaient tout autant d'application pour son cas que dans le camp adverse, son mental d'acier rattrapait les défaillances physiologiques brillamment, le laissant prêt à continuer jusqu'à ce que mort s'ensuive sur toute la ligne. Le Djinn allait le spolier, le déposséder de tous ses biens, qu'ils soient tangibles ou moraux et écraserait impitoyablement la coquille vide que cela en ferait. Son corps serait piétiné, comme il l'avait fait pour ceux de tant de défunts en sillonnant les champs de bataille les plus sanglants au cours de sa carrière. Sa tête serait un magnifique trophée, qu'il prendrait la peine de monter en bilboquet pour son seul amusement s'il n'avait eu que ça à faire. Mais le pain sur la planche foisonnait et il ne pouvait décemment pas sacrifier même une minute en loisirs morbides. Dommage, ce serait pour une autre fois, et un autre camarade de jeu. Fort heureusement, les crânes guillotinés, ce n'était pas ce qui manquait quand on était un soldat souvent en première ligne. Au propre tant qu'au figuré, se baisser permettait d'en ramasser sans compter, au point de pouvoir en faire de sanglants bouquets du plus bel effet. Forte impression garantie si ce rassemblement était laissé en vue dans ses quartiers... Que son empressement impératif était regrettable. Mais ce n'était que partie remise, il gardait ça pour acquis, ce qui lui donna la vivacité voulue pour contrer son premier tribut au royaume maléfique. Ce colisée contemporain serait là pour remplacer l'autel sur lequel la mise à mort serait donnée, et ce serait entre les dalles que sècherait le fluide vital du chevalier de bronze une fois cette cérémonie terminée.

À l'image des contes enfantins, le dragon devait mourir pour que triomphe son pourfendeur, s'emparant de tout ce que la redoutable créature avait pu protéger de son vivant. Quelle meilleure adaptation de ce cas de figure stéréotypé ? Tout comme l'ensemble des circonstances, la chance n'était pas du côté de la légende à écailles, et le romain serait à la fois l'épée et le chevalier auteurs de sa mort. Le combat au corps à corps, même si ce n'était que rudiments et théorie, n'était pas aussi négligé qu'on aurait pu le croire, même dans l'antiquité ; il fallait bien que les recrues puissent persévérer même sans arme, et ses compagnons de campement s'y connaissant plus avant l'avaient aidé à se perfectionner, même si ce n'était toujours pas sa tasse de thé. Aux grands maux, les grands remèdes. Ses poings décrivirent une trajectoire se plaçant à l'exact opposé de celles empruntées par le saint dans ses attaques, leurs poings se rencontrant à toute allure en une série de cliquetis métalliques venus de leurs apparats fissurés. Son armure étant à la fois plus solide et moins abimée que la panoplie verdâtre qu'endossait sa proie ruisselante d'écarlate, et la rencontre de leurs coups ne ferait que maximiser le renvoi de la force insufflée, tout le long du bras, puis du corps. Une douleur formidable, qui pouvait porter à l'extase quiconque savait l'apprécier à sa vraie valeur. Du premier choix.

Le bonheur ne pouvait exister sans douleur. Question d'équilibre, d'ordre naturel, de chakras et tout ce qui avait à s'assortir avec ce que tous prennent à tort pour des sottises. La vie était devenue plus facile qu'à son ère. Avec un accès facile au sexe, une technologie allant en grandissant, l'accès à la culture pour tous et l'humour surjoué, cette sensation de bien-être tant prisée avait perdu sa réelle clarté et ses bienfaits n'en étaient que trop atténués. Pour revenir à une vraie intensité à partir de cette joie artificielle, il fallait infliger, faire subir à tous et sans parcimonie. Donner la douleur, la partager, c'est transmettre un plaisir simple et pur à tous, accélérant le processus pour en revenir au commencement de cette allégresse, de cette satisfaction viciée par l'humanité et ses représentants impudents. C'était une mission, non pas divine mais humaine : cette première catégorie serait réservée à ce qui devrait arriver suite à son élévation. Purger le monde de ces sourires béats et idiots, des rires sans saveur et de tout ce qui pouvait faire croire à ses habitants qu'ils étaient pleinement heureux pour leur rappeler le vrai sens de ce mot, qu'il n'avait que trop bien connu et qui s'était finalement transformé en poignard pour le frapper dans le dos. Il ne l'oublierait jamais... Dans l'espoir de revoir un jour cette quintessence sentimentale, il devait rendre ce qui avait été perdu, enfoncé dans les méandres d'une évolution maladroite et trop épandue que pour consacrer de la place à ce qui était véritablement important, à débuter par ceci.

« Allons... Ne sois pas si pressé de mourir... Goûte au bonheur ! »

C'est la tête pleine d'idées à la fois perfides et saugrenues pour donner corps à sa philosophie de retour aux sources que le porteur de surplis serra le poing plus que le voulait la norme, concentrant son bras pour porter l'uppercut le plus fort qu'il pouvait donner. L'adrénaline venait renforcer ses phalanges et donnait une dimension novatrice à sa capacité physique, ne faisant que multiplier le danger représenté par sa silhouette basané et les mystères se cachant derrière son sourire parfois si inquiétant. Ses doigts repliés, crispés et aux articulations blanchies par la pression heurtèrent le coude jouxtant la main directrice de l'enfant de chœur qu'il torturait depuis que le gong avait retenti, signal de départ de ce carnage. Ce point sensible allait libérer une décharge électrique à travers les muscles adjacents et se propager, mal pernicieux. À la fois engourdissant et endolorissant, sans avoir à y laisser un soupir de cosmos. On pouvait difficilement revoir à la hausse cette rentabilité plus vieille que la planète bleue. C'était le mieux qu'il y avait à faire et qui soit en son pouvoir pendant que son énergie se recréait, se concentrant sous cette peau foncée par une cuisson solaire prolongée obtenue en arpentant des territoires dévastés pour son empereur de jadis. Les changements étaient mineurs, même après avoir traversé les âges...